Redécoupage électoral, interventions de Jean MALLOT
Création de la commission prévue à l'article 25 de la Constitution et élection des députés
Question préalable
M. le président. La parole est à M. Jean Mallot, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Jean Mallot. La révision de la Constitution a été adoptée en juillet dernier – certes de peu. Et par quelle mesure le Gouvernement a-t-il décidé de commencer à appliquer la nouvelle Constitution ? Eh bien par celle permettant aux ministres, le moment venu, de retrouver leur siège lorsque cessent leurs fonctions gouvernementales ! Quoi de plus urgent, en effet ? Outre que cette disposition constitutionnelle, et bientôt législative, vide de sa substance l’article de la Constitution qui prévoit l’incompatibilité entre fonction gouvernementale et mandat parlementaire, il apparaît qu’elle répond à un besoin de M. Sarkozy, qui a hâte de procéder à des remaniements ministériels, si possible sans risque. Un certain nombre de ministres sont en effet usés – parfois même très usés – d’autres, ont envie de changer d’air, et la plupart d’entre eux ne souhaitent pas trop se présenter devant leurs électeurs, dont certains les attendent le bâton à la main. Alors, que fait-on ? Eh bien, on fait voter une disposition qui évite l’élection !
M. Alain Gest. Cela a déjà été dit ! Vous vous répétez !
M. Jean Mallot. L’objectif de la révision constitutionnelle et du présent texte est très simple : il s’agit de renforcer encore les pouvoirs du Président de la République : les remaniements seront plus faciles et le Gouvernement sera plus encore dans la main de M. Sarkozy.
Par ailleurs, s’agissant de ces ministres qui repartaient au combat électoral pour retrouver leur siège, Mme Alliot-Marie a invoqué cet après-midi, assez curieusement, la faible participation que l’on observe dans ces élections partielles. Soit. Mais, si l’on se met à supprimer les élections lorsque la participation est faible, on ouvre la boîte de Pandore…
Un député du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Vous parlez des élections au sein du PS ?
M. Jean Mallot. En juin prochain, se dérouleront les élections européennes. La participation y est traditionnellement faible. Va-t-on les supprimer? À partir de quel seuil considère-t-on que la participation est suffisamment faible pour supprimer une élection ?
Autre raison majeure pour laquelle il n’y a pas lieu de délibérer de ce projet de loi : le comité pour la réforme des collectivités locales, présidé par Édouard Balladur, est censé réfléchir au rôle des différentes collectivités, à leur articulation, au découpage territorial. Que se passera-t-il si elle propose des regroupements de départements, de régions, ou des fusions entre département et région ? Qu’adviendra-t-il alors de votre redécoupage, monsieur le secrétaire d’État ? Faudra-t-il tout recommencer ?
On le voit bien, il est fort opportun d’attendre, non seulement les travaux de la commission Balladur, mais ses conclusions. À défaut, nous risquons de tout devoir remettre en chantier dans quelques mois.
Après tous les arguments développés par M. Le Roux, voilà trois raisons de plus de voter la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
(La question préalable, mise aux voix, n’est pas adoptée.)
Application de l'article 25 de la Constitution
Création de la commission prévue à l'article 25 de la Constitution et élection des députés
Discussion générale
. le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean Mallot.
M. Jean Mallot. Avant de commencer mon intervention, je serais tenté de demander à M. le secrétaire d’État s’il compte profiter de la présidence française de l’Union européenne pour proposer un changement du mode de scrutin pour l’élection des députés européens dont il vient de nous dire le plus grand mal.
M. Alain Gest. Bonne idée !
M. Jean Mallot. Revenons au redécoupage électoral.
Le Conseil constitutionnel le demande ; le Gouvernement et sa majorité UMP le font. À première vue, tout est clair et simple : on prend les résultats du recensement et on fait tourner l’ordinateur. En réalité, pour le Gouvernement et sa majorité de droite, l’occasion est trop belle. Ils ont la main ; ils s’en servent avec l’aide d’un spécialiste : M. Marleix, rémouleur en chef ; le rémouleur est l’artisan qui aiguise les instruments tranchants, nous rappelle le dictionnaire. Il va se faire ciseleur de circonscriptions. Son expérience sera précieuse : il a déjà opéré en 1986 aux côtés de M. Pasqua ; excusez du peu !
Dans son intervention de cet après-midi, M. Marleix – qui traverse les législatures et les alternances – nous a prévenus qu’il ne recherche pas le meilleur système pour redécouper. Il cherche autre chose, mais pas le meilleur système ! Il ne s’agit pas de redécouper pour empêcher toute alternance à gauche, mission impossible en cas de raz-de-marée. L’objectif, plus modeste et plus efficace, est de rendre l’arrivée d’une majorité de gauche moins fréquente et moins ample. Regardez ce qui s’est passé en 1988 et en 1997. Le redécoupage n’est pas pour rien dans le fait qu’il n’y ait qu’une majorité relative en 1988. Les méthodes sont connues et je vais y revenir.
M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république. Affirmation gratuite !
M. Jean Mallot. On peut le démontrer et une intervention de Bruno Le Roux en commission était tout à fait parlante. J’y reviendrai aussi.
Pour le moment, le suspens est maintenu. On attendrait l’adoption de la loi et les résultats officiels du recensement pour opérer. En réalité, les choses sont déjà bien avancées. Le secrétaire d’État ne s’en cache pas, et il réunit les députés par paquets, par région, afin de les consulter.
M. Jean-Pierre Grand. Moi je n’ai jamais été invité !
M. Jean Mallot. Votre tour va venir.
Après avoir exposé ce que nous savons déjà, il passe au concret et chacun repart avec la liste des circonscriptions de sa région qui vont disparaître ou apparaître, ou, plus exactement, avec la liste des départements qui vont perdre ou gagner des circonscriptions. C’est plus amusant pour le secrétaire d’État : il jouit du spectacle des députés qui se regardent de travers et s’interrogent les uns les autres.
Le découpage se ferait donc en respectant le périmètre des départements et l’intégrité des cantons existants. Soit. Alors, quel cas faites-vous des travaux de la commission Balladur qui commence ses opérations, et de ses conclusions à venir ?